Les manipulations des « dérangements intervertébraux » constituent l’un des meilleurs moyens de traiter les douleurs lombaires.
L’ostéopathie connaît un véritable engouement, notamment de la part des personnes qui souffrent de douleurs dans le bas du dos, qu’il s’agisse de banales lombalgies ou de très douloureuses sciatiques – le plus souvent dues à une hernie discale, mais, fort heureusement, dix fois moins fréquentes que le « tour de rein ». À l’occasion du 6e Congrès de la Société française de médecine manuelle orthopédique et ostéopathique, les médecins pratiquant cette spécialité viennent de rappeler que, chaque année en France, 100 000 lombalgies sont déclarées comme accidents du travail et 2 500 comme maladies professionnelles. Et ils ont précisé le cadre dans lequel leur prise en charge doit être effectuée.
Tout doit commencer par un bon examen clinique de la personne se plaignant du dos, voire des examens complémentaires pour confirmer un éventuel diagnostic de hernie discale. Ensuite, il suffit souvent d’être patient, au sens propre du terme. « Dans plus de la moitié des cas, l’évolution spontanée de la hernie discale et de la sciatique est favorable en deux à trois mois, sur fond de repos et d’antalgiques », rappelle le professeur Philippe Vautravers, chef du service de médecine physique et de réadaptation à l’hôpital Hautepierre de Strasbourg. C’est pourquoi seules les personnes qui continuent à souffrir au-delà du deuxième ou du troisième mois sont actuellement traitées.
Une étude réalisée en 2010 conclut à l’intérêt des manipulations vertébrales dans la lombosciatique, en cas d’échec d’un traitement médical bien conduit. Sur les 40 patients pris en charge après trois mois de traitement et qui ont été manipulés, 60 % d’entre eux présentaient un soulagement significatif des douleurs au bout de douze semaines. Ce travail confirme d’ailleurs les résultats de travaux antérieurs. Et pourtant, le docteur Jean-Yves Maigne, président de ce congrès, demande « davantage d’études pour bien préciser les indications et contre-indications des manipulations dans différentes situations », et notamment en cas de sciatique.
« La prudence doit être de mise »
Concernant l’intérêt de la médecine manuelle-ostéopathie en phase aiguë, les spécialistes insistent d’emblée sur la nécessité d’éliminer toute indication chirurgicale avant de manipuler. Et soulignent qu’il est impossible d’agir si le patient est bloqué dans toutes les directions. Enfin, même si les statistiques font état de complications rares (un accident pour près de 3,7 millions de manipulations), « la prudence doit être de mise en présence d’une hernie discale prouvée à l’imagerie et le choix du traitement doit être discuté », précise le professeur Philippe Vautravers.
Reste la question des éventuelles récidives. « Il faut réaliser un examen clinique rigoureux après un épisode de lombalgie ou de sciatique pour avoir le meilleur traitement possible, et surtout pour déceler les points de faiblesse, les causes, ce qu’il sera possible d’améliorer ou de modifier pour éviter toute récidive », estime le docteur Pierre Requier, spécialiste de médecine physique et de réadaptation à Marseille. L’étude du poste du travail est un élément important. Le problème du surpoids et l’état de la musculature doivent également être abordés. Pour le docteur Christian Caldagues, vice-président du Syndicat de médecine manuelle-ostéopathie de France, « l’approche globale est essentielle et l’accompagnement du patient doit être effectué par un médecin, qui est le chef d’orchestre de la prise en charge ».